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Fondation canadienne de l’allaitement maternel

Quand le bébé refuse de prendre le sein

Pourquoi un bébé refuserait-il de prendre le sein?

Il existe plusieurs raisons pour lesquelles un bébé pourrait refuser de prendre le sein. Souvent, c’est une combinaison de raisons. Par exemple, un bébé pourrait prendre le sein malgré une ankyloglossie (frein de la langue court) si aucun autre facteur n’entre en jeu, mais si, par exemple, il reçoit aussi tôt des bouteilles, ceci peut très bien changer la situation de « assez bien » à « pas du tout ».

  1. Si les mamelons de la mère sont particulièrement gros ou rétractés ou plats, ces variations peuvent rendre la prise du sein plus difficile, quoique pas habituellement impossible.
  2. Certains bébés ne sont pas intéressés à téter ou ont une succion faible en raison de médicaments qu’ils ont reçus durant le travail. Les narcotiques sont responsables de plusieurs telles situations, et la mépéridine (Démérol) est particulièrement mauvaise parce qu’elle reste longtemps dans la circulation du bébé et affecte sa succion pendant plusieurs jours. Même la morphine donnée sous forme d’épidurale peut faire en sorte que le bébé ne veut pas téter ou prendre le sein, étant donné que les médicaments donnés par épidurale atteignent définitivement la circulation maternelle, et donc celle du bébé avant la naissance.
  3. Le succionnement vigoureux à la naissance peut avoir pour résultat une mauvaise succion et le refus de prendre le sein. Un bébé né à terme et en santé n’a pas besoin d’être succionné.
  4. Les anomalies de la bouche du bébé peuvent avoir pour résultat une mauvaise succion et le refus de prendre le sein. Une fente palatine, mais pas une fente labiale, cause des difficultés sévères à prendre le sein. Parfois la fente palatine n’est pas évidente, et n’affecte que la partie interne de la bouche du bébé.
  5. Une ankyloglossie (frein de la langue court) peut rendre la prise du sein difficile. Strictement parlant, ceci n’est pas considéré comme étant une anomalie, et par conséquent, plusieurs médecins ne croient pas que cela peut interférer avec l’allaitement, mais ils sont mal informés.
  6. Un bébé apprend à téter au sein en tétant au sein. Les tétines artificielles interfèrent avec la façon dont les bébés prennent le sein. Les bébés ne sont pas stupides. S’ils obtiennent un débit lent au sein (comme il se doit dans les premiers jours de vie) et un débit rapide à la bouteille, ils ne seront pas confus – plusieurs comprendront l’astuce très rapidement.

Toutefois, une des causes de refus du sein les plus fréquentes provient de la notion erronée que durant les premiers jours de vie les bébés doivent téter toutes les 3 heures ou selon un quelconque horaire idiot. Cette fausse croyance cause de l’anxiété chez le personnel médical lorsqu’un bébé n’a pas été nourri, par exemple, 3 heures après la naissance, ce qui fait que beaucoup de bébés sont forcés au sein alors qu’ils ne sont pas encore prêts à boire. Quand un bébé est forcé à prendre le sein, et gardé au sein de force, alors qu’il n’est pas intéressé ou prêt, on ne doit pas se surprendre s’il développe une aversion pour le sein. Si cette approche mal orientée a pour conséquence la panique, et que « le bébé doit boire », des méthodes alternatives (la pire étant la bouteille) sont alors utilisées, ce qui aggrave la situation et engendre un cercle vicieux.

Il n’y a aucune preuve qu’un bébé né à terme et en santé développera une hypoglycémie s’il n’est pas nourri toutes les 3 heures. Toute cette question d’hypoglycémie est devenue une hystérie massive dans les pouponnières. Comme toutes les hystéries, elle a peut-être un fond de vérité, mais elle cause plus de problèmes qu’elle n’en prévient, incluant le problème que beaucoup de bébés reçoivent du lait artificiel alors qu’ils n’en ont pas besoin, sont séparés de leurs mères alors qu’ils n’ont pas besoin d’être séparés, et ne prennent pas le sein. Les bébés doivent être avec leurs mères, peau à peau, 24 heures sur 24 (voir le feuillet no 1b L’importance du contact peau-à-peau). Lorsqu’ils sont prêts, la plupart vont commencer à chercher le sein. Laisser la mère et son bébé ensemble, peau à peau, immédiatement après la naissance, et les laisser se « trouver », préviendra la plupart des situations qui font que le bébé ne prend pas le sein. De plus, mère et bébé ensemble garde le bébé au chaud autant que sous une lampe chauffante. Laisser la mère et le bébé ensemble 5 minutes n’est pas suffisant. Ils doivent être ensemble jusqu’à ce que le bébé prenne le sein, sans pression, sans limites de temps (« on doit peser le bébé », « on doit lui donner son injection de vitamine K », etc. – ces interventions peuvent attendre!). Ceci peut prendre une à deux heures ou plus.

Mais le bébé ne prend pas le sein!

Alors d’accord, combien de temps peut-on attendre? Il n’y a pas de réponse évidente. Certainement, si le bébé n’a montré aucun intérêt à téter ou boire 12 à 24 heures après la naissance, il peut être utile de faire quelque chose, particulièrement parce que les politiques d’hôpital requièrent habituellement que la mère ait son congé 24 à 48 heures après la naissance. Que faire?

  1. La mère devrait commencer à exprimer son lait, et ce lait (colostrum), soit seul ou mélangé avec de l’eau glucosée, devrait être donné au bébé, de préférence au doigt. S’il est difficile d’extraire le colostrum (l’expression à la main fonctionne souvent mieux qu’un tire-lait durant les premiers jours), l’eau glucosée seule est acceptable dans les premiers jours. Au doigt, la plupart des bébés commenceront à téter, et beaucoup s’éveilleront assez pour essayer d’aller au sein. Aussitôt que le bébé tète bien, l’alimentation au doigt devrait être cessée et le bébé mis au sein. L’alimentation au doigt est essentiellement une procédure pour préparer le bébé à prendre le sein, et non à priori une méthode pour éviter les biberons, même si elle permet de le faire. On l’utilise donc avant de tenter de mettre le bébé au sein, pour le préparer à prendre le sein. Voir le feuillet no 8 Alimentation au doigt.
  2. Tôt, avant le congé, une aide compétente doit être trouvée pour que la mère ait de l’assistance au plus tard au 4e ou 5e jour. Plusieurs bébés qui ne prennent pas le sein durant les premiers jours le feront à merveille une fois que la production lactée de la mère aura augmenté substantiellement comme il se doit environ 3 ou 4 jours après la naissance. Avoir de l’aide à ce stade permet d’éviter les associations négatives que beaucoup de bébés développent avec le temps.
  3. Une téterelle utilisée avant que la production lactée de la mère soit abondante (jour 4 ou 5) est une mauvaise pratique. Commencer à utiliser une téterelle avant la « montée laiteuse » ne donne pas la chance au temps de faire son œuvre. De plus, si elle est mal utilisée (comme c’est souvent le cas), la téterelle peut causer une baisse importante de la production lactée.

Je suis de retour à la maison. Mon bébé ne prend pas le sein. Que faire?

Le facteur le plus important qui influe sur le fait que le bébé prendra le sein ou non est si la mère établit une bonne production lactée. Si la production est abondante, le bébé prendra le sein quoi qu’il arrive à 4 à 8 semaines. L’approche que nous préconisons est de faire en sorte que le bébé prenne le sein plus tôt, pour que vous n’ayez pas à attendre si longtemps. Alors, il est plus important que vous mainteniez votre production que d’éviter la bouteille. La bouteille interfère, et il est préférable que vous utilisiez d’autres méthodes (comme le gobelet) si vous le pouvez, mais si vous pensez que vous n’avez pas le choix, vous faites ce qu’il faut.

Comment maintenir et augmenter la production lactée

Ne vous découragez pas. Même si votre production ne satisfait pas tout à fait les besoins de votre bébé, beaucoup de bébés prendront tout de même le sein. Obtenez une aide compétente. N’entreprenez pas ceci toute seule.


Traduction de l’article n°26, « When Baby Does Not Yet Latch ». Janvier 2005 par Jack Newman, MD, FRCPC © 2005

Version française, mai 2005, par Stéphanie Dupras, IBCLC, RLC

Peut être copié et diffusé sans autre autorisation, à condition qu’il ne soit utilisé dans aucun contexte où le Code international de commercialisation des substituts du lait maternel de l’OMS est violé.