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Fondation canadienne de l’allaitement maternel

Les toxines et l’alimentation du bébé

La question des toxines dans le lait maternel est examinée dans ce feuillet informatif parce que ce sujet refait surface régulièrement dans les média. Il cause bien des craintes chez plusieurs femmes enceintes face à l’allaitement et plusieurs mères allaitantes décident d’arrêter d’allaiter quand ce sujet est traité dans les média. Les journalistes ne semblent pas savoir comment traiter cette question de toxines. Certains pourraient avoir une arrière-pensée comme : « mon bébé n’a pas été allaité et il va bien » et pourraient ainsi avoir une façon d’attaquer des défenseurs de l’allaitement en justifiant leur « choix d’alimentation pour leur bébé » ce qui n’est pas très professionnel. D’autres essaient simplement de répandre la nouvelle souvent sans bien comprendre le sujet. Par exemple, ils ne comprennent pas qu’en parlant des toxines retrouvées dans le lait maternel et en considérant les formules comme étant un choix comparable, ils attaquent l’allaitement maternel.

Pourquoi tant d’études examinent-elles les toxines dans le lait maternel ? On a l’impression d’être pris de panique devant l’état du lait maternel dans notre monde moderne tellement pollué que chacun essaie de l’étudier. Mais la raison pour laquelle le lait maternel est si souvent étudié est qu’il est facile d’accès et qu’il est un échantillon de fluide organique facile à prélever. Voilà la raison et non pas que les scientifiques soient particulièrement inquiets au sujet du lait maternel. Nous devrions être inquiets de tous nos fluides organiques étant donné le niveau de pollution que nous avons créé dans le monde.

Les formules sont-elles presque pareilles au lait maternel ?

Nous devons nous poser la question si nous voulons essayer de comprendre le problème des toxines dans le lait maternel. La réponse est non. Les formules ne sont pas presque pareilles au lait maternel et de loin. À quelques années d’intervalle, les fabricants ajoutent à leurs formules quelque chose que nous savions être dans la composition du lait maternel depuis des années mais qui était alors jugé sans importance par les manufacturiers. Qu’il y ait quelque chose d’ajouté ne signifie pas que la formule « nouvelle et améliorée » est tout comme le lait maternel. Dans certains cas, la formule est améliorée mais souvenez-vous qu’ils nous disaient aussi de la formule précédente qu’elle était presque comme le lait maternel. Il y a amélioration, par exemple, avec les acides gras polyinsaturés à longue chaine (DHA et ARA) qui sont censés rendre votre bébé plus intelligent. Un fabricant appelle même sa formule A+, mais elle ne mérite qu’un C- tout au plus. Nous connaissons depuis plusieurs années l’importance de ces gras mais pendant longtemps, avant de les ajouter à leurs formules, bien entendu, les fabricants et même certains professionnels de la santé continuaient de dire que cela n’avait pas d’importance et qu’il n’y avait aucune preuve que ces gras aient de la valeur (cela se retrouve encore dans les déclarations de la Société canadienne de pédiatrie de 1995 au sujet des besoins nutritifs des prématurés). Ce cycle de : « notre lait est tout à fait comme le lait maternel » suivi de « nous avons maintenant ajouté x à notre lait qui est encore plus semblable au lait maternel » dure depuis le 19è siècle.

La vérité est que :

  1. Le fait d’ajouter quelque chose à la formule, même si les quantités sont les mêmes que dans le lait maternel ne veut pas dire que le bébé recevra la quantité dont il a besoin ou recevra la bonne sorte de ce quelque chose qui est ajouté dont il a besoin. L’exemple du fer nous aidera à saisir cela. Le lait maternel contient suffisamment de fer pour suffire aux besoins du bébé pendant au moins les six premiers mois. Il a déjà accumulé des réserves de fer durant la grossesse. Pour maintenir adéquatement le niveau de fer chez un bébé nourri aux formules, celles-ci doivent contenir au moins six fois plus de fer que le lait maternel, simplement parce que le fer des formules n’est pas aussi bien absorbé dans l’intestin du bébé que le fer dans le lait maternel.
  2. Il y a encore une centaine de composants du lait maternel qui ne sont pas encore ajoutés aux formules.
  3. Les composants du lait maternel varient du matin au soir, de jour en jour, du début de la tétée à la fin, du premier jour au jour 4 au jour 100…donc il n’y a aucune façon de connaître précisément ce que le lait maternel contient réellement. Cela signifie qu’il est impossible de reproduire le lait maternel car le lait maternel standard n’existe pas. En fait, puisque chaque femme produit un lait quelque peu différent, la notion de lait maternel standard devient insensée. Le lait maternel est un fluide vivant et dynamique. Les formules sont des soupes chimiques.

Donc, que signifie tout cela ?

Cela veut dire que nous devrions considérer comme médicaments les formules qui sont, à bien y penser, exactement cela. Elles remplacent le lait maternel qui est un fluide normal. Les formules ne sont que superficiellement semblables à ce qu’elles remplacent. Elles peuvent causer des effets secondaires à court, moyen et long terme et, certains, assez importants et irréversibles. Les formules peuvent être parfois nécessaires tout comme les médicaments. Dans des cas rares, elles sauvent des vies, comme le font les médicaments.

Mon professeur de pharmacologie à la faculté de médecine disait qu’un médicament est un poison ou une toxine qui a des effets bénéfiques. Cette déclaration contient beaucoup de sagesse. Alors, lorsqu’une mère décide de donner du lait artificiel (formule) à son bébé au lieu de l’allaiter, elle n’élimine pas le problème de toxines.

En fait, il est surprenant de constater notre indulgence envers les formules. Dans les articles que j’ai lus et dans les programmes à la télévision qui rapportent la présence de toxines dans le lait maternel, l’existence de toxines dans les formules n’est pas mentionnée. Pourquoi, alors que tout est pollué sur la terre, les formules en seraient-elles exemptes ? Les formules contiennent des métaux lourds y compris le plomb, par exemple, en quantités beaucoup plus élevées que dans le lait maternel. Et pourquoi les pesticides seraient-ils absents des formules quand les vaches broutent l’herbe dans les champs qui en ont été arrosés ? Et les fèves de soya poussent aussi dans ces champs. Il est intéressant de noter que nous ne retrouvons pas de nouvelles sur ce sujet dans les média.

Mais les toxines sont nocives, n’est-ce pas ?

Oui, elles le sont et le lait maternel aide à minimiser ces effets nocifs. Voici quelques faits :

  1. Les toxines augmentent le risque de développer certains cancers. Vrai. Il a été prouvé que les bébés allaités ont un moindre risque de développer certains cancers que les bébés nourris artificiellement.
  2. Les toxines peuvent altérer les fonctions neurologiques et l’apprentissage. Vrai. Il a été prouvé que les enfants qui ont été allaités réussissent mieux les tests neurologiques et cognitifs que ceux qui ont été nourris aux formules, et plus longue la durée de l’allaitement, meilleurs les résultats.
  3. Les toxines peuvent affaiblir le système immunitaire. Vrai. Il a été prouvé que les bébés qui ont été allaités ont un système immunitaire meilleur et plus mature que celui de ceux nourris artificiellement. Cette immunité se poursuit au-delà de la durée de l’allaitement.

Que faire ?

En allaitant votre bébé, vous lui donnez ce qu’il y a de mieux et vous faites ce qu’il y a de mieux pour l’environnement. Nourrir avec des formules contribue à la pollution de l’environnement. La présence de polluants dans le lait maternel peut-être comparé à la situation du canari dans les mines de charbon. Nous devrions être préoccupés de l’état de notre planète, mais ceci ne devrait pas nous pousser à encourager les mères à nourrir leur bébé artificiellement.


Feuillet d’information Les toxines et l’alimentation du bébé 2009©
La version originale en anglais « Toxins and Infant Feeding » révisé en 2009 par Jack Newman et Édith Kernerman